Achats indirects : définition, enjeux 2025 et retours d’expérience

Dans la plupart des organisations, les achats indirects (ou hors production) représentent une mosaïque de dépenses aussi nécessaires que dispersées : prestations intellectuelles, IT & télécoms, facilities, frais de déplacements, marketing, logistique interne, énergie, etc.

Leur particularité ? Ils ne rentrent pas dans la fabrication du produit vendu, mais soutiennent le fonctionnement quotidien de l’entreprise, d’où leur poids opérationnel et budgétaire. Cette frontière entre « ce qui entre dans le produit final » et « ce qui soutient l’activité » reste le repère le plus fiable pour distinguer achats directs et indirects.


Pourquoi les achats indirects sont redevenus stratégiques

Trois dynamiques tirent la fonction vers le haut en 2024-2025 :

  1. Des coûts de structure sous tension.
    Après le pic de 2022-2023, l’inflation de la zone euro a nettement reflué, mais les pressions salariales demeurent élevées ce qui pèse directement sur les catégories de services (facility, prestations, intérim, etc.).
  2. Des exigences ESG et reporting extra-financier.
    La CSRD et les normes ESRS transposées en droit français structurent le pilotage des impacts et émissions de la chaîne de valeur (Scope 3). Les directions achats doivent désormais documenter, engager et suivre les fournisseurs y compris sur les catégories indirectes (marketing, services, flotte, IT).
  3. La digitalisation et le pilotage de la « tail spend ».
    La dispersion des petits achats, hors contrats cadres, reste un gisement de productivité et de conformité. Les retours 2024-2025 insistent sur la visibilité data, la redirection des « acheteurs internes » vers les bons canaux (catalogues, marketplaces B2B) et l’usage croissant d’outils dopés à l’IA pour canaliser la demande et réduire les écarts au processus.

Les achats indirects regroupent les biens et services non incorporés au produit final, mais indispensables au fonctionnement de l’entreprise. Leur pilotage alliant consolidation, contractualisation, conformité et mesure d’impact est devenu un levier de performance et de résilience.


Quatre enjeux clés en 2025

1) Gouvernance & maîtrise de la demande

Les achats indirects sont souvent fragmentés entre métiers, filiales et sites ; la gouvernance vise à clarifier qui décide quoi (seuils, panels, canaux d’achat) et à réduire les écarts au processus. Les benchmarks 2024 pointent l’alignement SRM-P2P-Contrats et le passage au cloud pour standardiser et sécuriser.1

2) Data & « tail spend »

La « queue de dépense » (nombreux petits fournisseurs/commandes) masque des coûts cachés : temps de traitement, tâches de réconciliations et risques (fiscaux, éthiques, cybersécurité).
Les bonnes pratiques 2024 : classifications normalisées, consolidation de catalogues, seuils de sourcing et coaching des prescripteurs via le self-service — avec l’IA pour orienter la demande et automatiser la conformité. 2

3) ESG/CSRD & achats responsables

Les ESRS exigent de documenter les impacts environnementaux et sociaux dans la chaîne de valeur, y compris via les fournisseurs de services. Les programmes d’achats durables doivent donc élargir leur périmètre au Scope 3 « indirect » (déplacements, numérique, bâtiments, sous-traitance de services). Des ajustements réglementaires sont en débat au niveau européen en 2025 ; les directions achats doivent se préparer à des règles modulées mais toujours structurantes.

4) Résilience & budgets

Même avec l’inflation en reflux, les coûts d’exploitation (énergie, facility, prestations) demeurent volatils. La discipline d’achats indirects (standardisation, renégociation de services, clauses d’indexation maîtrisées, should-cost services) redevient un outil de stabilisation budgétaire.


Évolution des pratiques (2015 → 2025)

2015-2019 : centralisation progressive, premiers P2P, panels segmentés par catégorie.
2020-2022 : choc COVID-énergie-inflation ; accélération de la dématérialisation, contrôle des dépenses d’urgence et renforcement des contrats cadres, focus risques fournisseurs.
2023-2025 : consolidation data (classification, référentiels), SRM + Contrats + AP intégrés, pilotage ESG et montée en puissance des outils IA (guidage des demandeurs, écriture automatique des besoins, détection d’anomalies, aide à la négociation).


Bonnes pratiques 2025 pour les achats indirects

1) Clarifier la doctrine d’achat
Documenter « qui achète quoi, comment, via quel canal », avec seuils (X € = catalogue / Y € = mini-compétition / Z € = appel d’offres) et responsabilités (prescripteur, acheteur, valideur). Les retours 2024 soulignent l’importance d’une gouvernance unifiée entre métiers, achats, finance et IT.

2) Structurer la donnée
Normaliser la classification, nettoyer les tiers, relier contrats-commandes-factures pour une visibilité « du besoin au paiement ». L’objectif : réduire la tail spend par redirection vers les panels et mesurer les gains (coûts de traitement, conformité, ESG).

3) Contractualiser intelligemment
Combiner contrats cadres et catalogues pour les commodités, prévoir SLA/KPI simples (qualité de service, délais, NPS interne) et clauses ESG pertinentes (énergie, déchets, empreinte numérique). 3

4) Outiller les prescripteurs… et les protéger
Déployer des parcours d’achat guidés (demande → validation → commande), avec usage de l’IA pour suggérer le bon contrat et détecter les anomalies (objets non conformes, doublons, segmentation artificielle). 4

5) Anticiper les évolutions réglementaires
La CSRD s’applique déjà ; des ajustements sont discutés au niveau européen sans remettre en cause l’orientation de fond : davantage de transparence et de mesure dans la chaîne de valeur.
Les équipes achats doivent sécuriser la donnée et documenter leurs plans de progrès. 5


Indicateurs à suivre

  • % de dépenses sous contrat (indirect)
  • Nombre de fournisseurs actifs / 80-20 (concentration de la tail spend)
  • Taux de maverick buying (valeur/volume)
  • KPI de service (SLA) et KPI d’impact (Scope 3 pertinent, achats responsables
  • Délai moyen de cycle (demande → PO → service fait → paiement)


À retenir

  • Définition claire : les achats indirects ne s’incorporent pas au produit final mais font tourner l’entreprise.
  • Momentum 2025 : inflation en reflux mais coûts de structure élevés, CSRD/ESRS, digitalisation & IA → pilotage data-driven.


Sources

  1. APQC (2024) — Direct and Indirect Procurement Trends (cross-industry). APQC
  2. SpendHQ (2024) — Understanding tail spend. SpendHQ
  3. EcoVadis (2024) — CSRD : exigences chaîne de valeur et Scope 3. resources.ecovadis.com
  4. GEP (2025) — AI transforming tail spend management. gep.com
  5. Latham & Watkins (2024) — Transposition CSRD en France, ESRS adoptés. Latham & Watkins
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